Un nombre croissant d’espèces font face à un risque important d’extinction. La conservation de la faune joue donc un rôle de plus en plus crucial. L’étude du comportement animal est essentielle pour nous aider à créer des environnements optimisés selon les espèces où les animaux, en particulier ceux qui sont menacés, peuvent vivre heureux et sainement tout en nous éclairant sur le comportement humain. Les zoos et d’autres espaces de conservation travaillent à la création d’habitats favorisant le bien-être animal. Pour y parvenir, il est indispensable d’effectuer un suivi de la santé et du bien-être de leurs pensionnaires.
Cependant, les méthodes actuelles pour collecter ce type de données peuvent être laborieuses et fastidieuses. La recherche sur le comportement animal est généralement menée manuellement et en temps réel à l’aide d’une feuille, d’un stylo et d’une planchette à pince, ou de vidéos qui doivent ensuite être annotées individuellement. Malgré de nombreuses avancées technologiques dans le domaine, les dispositifs actuels capables d’enregistrer l’emplacement, la fréquence cardiaque et le mouvement doivent souvent être physiquement attachés à l’animal observé. Jusqu’à présent, aucune technologie ni aucun appareil n’est capable de faire tout cela de façon non obstructive et non effractive.
En collaboration avec l’entreprise technologique canadienne EAIGLE et le zoo de Toronto qui défend une approche axée sur la conservation, une équipe de recherche de l’Université York a créé une technologie capable de collecter des données en masse et de suivre 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 les animaux observés. Créé à l’origine pour aider les magasins et les attractions à ajuster leur aménagement en fonction du comportement de la clientèle et à surveiller la température pendant la pandémie de COVID-19, le modèle d’IA a été adapté par l’équipe pour améliorer le bien-être et la qualité de vie des animaux, à commencer par six pensionnaires du zoo de Toronto.
Les humains de la forêt 
Âgés de 16 à 54 ans, les orangs-outans de Sumatra Puppe, Ramai, Sekali, Budi, Kembali et Jingga font partie de la première cohorte de mammifères profitant de cette technologie inédite. Ces orangs-outans devraient à terme être introduits dans un nouvel habitat extérieur. On suit donc leur bien-être pour que la transition se fasse aussi facilement que possible et pour s’assurer qu’ils s’adaptent bien à leur nouvel environnement.
Les deux premières phases du projet consistaient à entraîner le modèle d’IA à reconnaître les orangs-outans, puis à savoir comment les différencier. Le projet est actuellement dans sa troisième phase.
« Après avoir installé des caméras dans leur habitat, nous avons passé des centaines d’heures à examiner chaque image et à les annoter », explique Jenna Congdon, Ph. D., chercheuse postdoctorale qui travaille sur le projet. « Ce travail était fastidieux, mais essentiel pour pouvoir entraîner le modèle d’IA à reconnaître chaque orang-outan individuellement. C’était aussi une étape nécessaire avant de pouvoir passer à la troisième phase pour collecter des données sur les comportements en tant que tels. »
Étant donné la proximité physique entre les orangs-outans et les humains qui appartiennent à l’espèce des grands singes, on a naturellement décidé de commencer par essayer d’adapter cette technologie de pointe pour travailler sur les orangs-outans, ou, comme on les appelle familièrement, « les humains de la forêt ».
« La technologie existait déjà. Nous devions simplement trouver un moyen de l’adapter à d’autres espèces. Comme les orangs-outans sont proches des humains et que je travaillais déjà avec eux depuis de nombreuses années, c’est ce qui avait le plus de sens », raconte Suzanne MacDonald, Ph. D., professeure au Département de psychologie de l’Université York et professeure superviseure du projet.
La référence
La troisième phase du projet est en cours et l’équipe a déjà terminé le processus d’estimation de pose (par exemple, préciser des repères sur le corps comme les épaules et la tête) et s’apprête à commencer la surveillance des six orangs-outans.
« C’est la partie la plus passionnante », se réjouit Jenna Congdon. « Avoir la possibilité d’analyser ce que les orangs-outans font réellement et comment ils utilisent leur espace sera d’une importance primordiale pour améliorer leur bien-être et leur qualité de vie. »
« Grâce à ces données, le zoo pourra potentiellement concevoir de meilleurs habitats à l’avenir, fournir des environnements améliorés et enrichissants à ses pensionnaires, et détecter plus rapidement les affections et les maladies », explique la docteure en médecine vétérinaire Mina Hosseini, deuxième chercheuse postdoctorale collaborant au projet.
Au fur et à mesure qu’elle développe et ajuste cette technologie, l’équipe espère qu’elle deviendra la « référence » pour les zoos menant des initiatives de conservation partout dans le monde.
« Maintenant que nous avons adapté cette technologie aux orangs-outans, nous allons pouvoir accélérer le processus et l’étendre à d’autres espèces », affirme Mahdi Marsousi, directeur de la technologie chez EAIGLE. « Elle a le potentiel d’aider le zoo de Toronto dans ses efforts de conservation, mais aussi d’autres zoos et espaces de conservation dans le monde. »
« Au final, ce qui compte c’est d’améliorer la qualité de vie des animaux », résume Maria Franke, gestionnaire de la science du bien-être au zoo de Toronto.
Le Canada à l’avant-garde 
L’objectif principal du projet est de parvenir à programmer l’intelligence artificielle pour reconnaître des comportements spécifiques, mais il permettra aussi à des zoos, des sites de conservations et des équipes de recherche de collecter des données de façon non obstructive, efficace et non biaisée.
« Le Canada est précurseur dans ce type de recherche », explique Suzanne MacDonald.
« Il existe des technologies de reconnaissance individuelle et thermique. Mais jusqu’à présent, rien ne permettait vraiment de faire tout cela et d’y associer les comportements avec le niveau de précision que nous tentons d’atteindre ici. Ça se passe ici, chez nous. Et quel meilleur endroit que le zoo de Toronto pour le faire? », ajoute Jenna Congdon.
Alors que l’équipe continue de tester et d’améliorer sa technologie, elle reconnaît que Mitacs leur a fourni les conseils et le soutien dont elle avait besoin à un moment critique du développement de sa solution.
« Des projets importants comme celui-ci méritent un coup de projecteur pour qu’on rappelle aux gens toutes les bonnes choses qui se passent au zoo de Toronto et le soin constant que nous apportons aux animaux », poursuit la chercheuse. « Il s’agit de leur lieu de vie et nous essayons de le rendre le plus confortable possible. Le soutien de Mitacs a été essentiel pour nous aider à y parvenir. » « Du point de vue du zoo de Toronto, tout s’est fait sans heurts et nous voulons continuer cette incroyable collaboration », ajoute Maria Franke.
« Si nous avons eu la chance d’avoir ces deux fabuleuses chercheuses postdoctorales, c’est uniquement grâce à l’appui et au financement indispensables que nous avons reçus. Nous ne pourrions tout simplement pas faire ça sans Mitacs », conclut la professeure MacDonald.
Les programmes de Mitacs sont financés par plusieurs partenaires estimés à travers le Canada. Nous remercions le gouvernement du Canada, le gouvernement de l’Alberta, le gouvernement de la Colombie-Britannique, Research Manitoba, le gouvernement du Nouveau-Brunswick, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, le gouvernement de l’Ontario, Innovation PEI, le gouvernement du Québec, le gouvernement de la Saskatchewan, le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador et le gouvernement du Yukon de nous aider à favoriser l’innovation et la croissance économique partout au pays.
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