Vancouver Sun : Relier les programmes de recherche et d’innovation du Canada

La décision du gouvernement Trudeau, le mois dernier, de nommer un conseiller scientifique fédéral devrait être une bonne nouvelle pour quiconque appuie des principes comme l’élaboration de politiques fondées sur des données probantes et des initiatives plus vastes qui soutiennent les secteurs de la recherche et de l’innovation du Canada.

La nomination de la Dre Mona Nemer, une éminente généticienne moléculaire, intervient à un moment où Ottawa se prépare à investir 950 millions de dollars dans un réseau de « super-grappes » tout en tenant compte des recommandations de grande envergure du groupe d’experts du Dr David Naylor qui renforcent les fondements de la recherche canadienne.

Le mandat du conseiller scientifique est vaste, mais il comprend une attente que Nemer conseillera le premier ministre Justin Trudeau sur des questions scientifiques d’importance pour notre pays. Le comité Naylor, à son tour, demande la création d’un Conseil consultatif national sur la recherche et l’innovation qui superviserait les programmes fédéraux de recherche et d’innovation.

Je suis d’accord avec le diagnostic de Naylor sur l’écosystème de recherche fédéral, et j’espère que le gouvernement fédéral suivra ses conseils pour combler les déficits de financement qui se sont accumulés au cours des dernières années, en particulier dans la recherche dirigée par des chercheurs et le soutien aux chercheurs en début de carrière et à la diversité. L’appel du comité à renforcer le soutien à l’enquête multidisciplinaire frappe absolument la marque : c’est la façon dont le monde évolue.

Quelle sera la relation entre les initiatives de haut niveau, comme la stratégie des super-grappes, qui a attiré des groupes de soumissionnaires représentant un éventail de secteurs à forte intensité de sciences et de technologie, et une politique scientifique fédérale qui vise, conformément aux recommandations de Naylor, à une approche plus cohérente ?

Et comment ces initiatives politiques parallèles aborderont-elles le dilemme des deux solitudes qui a longtemps entravé la politique de R&D, qui est la division enracinée et souvent artificielle entre la recherche scientifique fondamentale et appliquée ?

Ceux d’entre nous qui ont, ou qui sont engagés dans, des carrières de recherche savent que beaucoup de nos collègues font régulièrement des allers-retours entre ces deux polarités, entre le milieu universitaire et l’industrie, et entre les disciplines.

Dans le cadre de son travail en tant que directeur du Centre de recherche sur l’énergie propre, par exemple, Walter Mérida, professeur de génie mécanique à l’Université de la Colombie-Britannique, explore des solutions viables à l’énergie durable. Mais son travail a inclus des collaborations actives avec des entreprises comme Siemens et Fortis B.C.

Jacques Corbeil, de l’Université Laval, est l’un des trois chercheurs principaux impliqués dans un projet multidisciplinaire visant à transformer la sécurité dans le traitement des dons de sang. Le travail implique la recherche en intelligence artificielle et en analyse de données. Le projet est vraiment transdisciplinaire et Corbeil a pu profiter de la collaboration avec des partenaires de l’industrie, Waters et Phytronix. Puis, avec les fonds du secteur privé en place, il s’est tourné vers Mitacs pour obtenir le reste du financement.

Le but ici n’est pas d’offrir une preuve par l’exemple, mais plutôt de noter que lorsque les chercheurs sont en mesure de faire la transition entre les domaines - et lorsque les politiques et les structures de financement permettent, au lieu de limiter, ce type de diversification de l’expérience - le processus d’enquête qui en résulte ne peut que devenir plus riche et plus informé.

Après tout, l’essence de l’érudition et de la recherche scientifique est la dynamique itérative implacable entre l’hypothèse, l’expérimentation, l’examen critique et l’innovation. Pour les chercheurs de toutes les disciplines, les nouvelles données et les nouvelles perspectives, ou points de vue, ne sont pas seulement importants, ils sont déterminants.

Mitacs, pour sa part, a cherché à surmonter ces silos institutionnels et sectoriels avec des stages et des financements visant à mettre en relation les étudiants, les postdoctorants et les universitaires avec des organismes de recherche publics et privés. L’objectif ultime est de favoriser un écosystème étendu de recherche et d’innovation.

Mon conseil non sollicité au nouveau conseiller scientifique est donc le suivant : les ponts sont essentiels au processus visant à rendre le vaste programme de recherche et d’innovation du Canada plus stratégique et efficace. Pourquoi ? Parce qu’ils permettent la pollinisation croisée qui stimulera la découverte, la croissance économique et, en fin de compte, une meilleure qualité de vie.

Par : Alejandro Adem

Alejandro Adem est chef de la direction et directeur scientifique de Mitacs, un organisme national sans but lucratif qui finance la recherche et la formation dans les universités afin de favoriser l’innovation dans tous les secteurs. Il est également titulaire d’une chaire de recherche du Canada à l’Université de la Colombie-Britannique.

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