Globe and Mail : Voir le monde. Mais voyez aussi le Canada

En regardant Erin Freeland Ballantyne recevoir le prix du leader émergent du Forum des politiques publiques le mois dernier, il m’est venu à l’esprit à quel point on néglige dans toute l’introspection sur l’enrichissement potentiel d’une formation universitaire.

Le Canada veut que ses citoyens soient des acteurs de la communauté mondiale, il doit donc diplômer des « étudiants sans frontières », qui peuvent se déplacer librement à l’intérieur et au-delà de nos universités, provinces, frontières nationales et milieu postsecondaire lui-même pour relever de nouveaux défis et opportunités.

Pourtant, les statistiques montrent que seulement un étudiant de premier cycle sur 10 s’aventure au-delà de sa province d’origine pour fréquenter l’université, et beaucoup restent à moins de 20 kilomètres de chez eux. Lorsqu’il s’agit de cultiver des perspectives mondiales, le Canada s’est engagé à doubler pour atteindre 450 000 le nombre d’étudiants internationaux entrants d’ici 2022. Mais en termes d’exposition internationale pour le nôtre, nous sommes à la traîne par rapport à d’autres pays de l’OCDE avec un minuscule 2,2% de nos étudiants qui vont à l’étranger.

La « mobilité universitaire » n’est pas seulement géographique, mais disciplinaire. Il s’agit notamment de repenser le baccalauréat, en grande partie la mesure dans laquelle il fournit des connaissances interdisciplinaires, l’exposition à différentes méthodes et compétences, et des possibilités d’apprentissage par l’expérience. Préparer les étudiants à une vie d’adaptation signifie encourager leur curiosité et leur agilité par l’exploration de multiples trajectoires d’études, y compris des voies pratiques qui mènent à des carrières. Les universités sont un terrain idéal et fertile pour produire des diplômés qui comprennent vraiment le contexte et qui « obtiennent » la vue d’ensemble.

En tant que professeur à l’Université McGill, ma plus grande joie est d’avoir une salle de classe remplie d’un échantillon représentatif d’étudiants de partout au pays et du monde entier. Ces jeunes gens brillants engendrent une ouverture d’esprit et un dynamisme qui ajoutent des perspectives et de nouvelles dimensions à toute discussion. Les nouvelles dimensions qu’ils apportent à l’expérience d’apprentissage sont merveilleusement contagieuses.

Ce qui nous ramène à Ballantyne, une boursière Rhodes et boursière d’Action Canada qui est un brillant exemple de mobilité entre la géographie et les disciplines. Elle est une habitante du Nord de quatrième génération qui, après avoir obtenu un baccalauréat en développement international de McGill et une maîtrise et un doctorat en politique environnementale d’Oxford, a fondé le Dechinta Centre for Research and Learning dans les Territoires du Nord-Ouest, qui offre des semestres universitaires sur des questions cruciales du Nord. Ballantyne a fait de grands progrès dans la création d’un espace qui valorise et met à profit les cultures et les connaissances du Nord au profit du Nord, du Canada et du monde. Des gens comme elle incarnent la valeur de la mobilité et la nécessité pour les établissements d’enseignement postsecondaire de créer les conditions propices à l’épanouissement et à la réussite de ces jeunes inspirants.

En Ontario, le nouveau Conseil sur l’articulation et le transfert (ONCAT) s’attaque de front à la mobilité. Déterminé à accroître la mobilité entre les universités et les collèges, la priorité stratégique de l’ONCAT est de faciliter la mobilité étudiante entre les 44 établissements d’enseignement postsecondaire financés par l’État dans la province. Il a mis au point un portail Web dédié, 600 voies d’accès entre les collèges et les universités et plus de 65 projets de transition multi-institutions.

Ce modèle pourrait être reproduit non seulement partout au Canada, mais à l’échelle internationale. Si la mobilité au-delà des frontières provinciales mène à une compréhension plus profonde et plus holistique, alors l’expérience internationale stimule la sensibilisation et la citoyenneté mondiales, donnant aux étudiants une perspective inestimable et maximisant les intérêts et les relations du Canada à l’étranger.

Il existe déjà plusieurs programmes qui offrent des stages, des programmes coopératifs et des échanges, dont Mitacs Globalink, qui relie des étudiants et des professeurs canadiens à des chercheurs du Brésil, de la Chine, de l’Inde, du Mexique, de la Turquie et du Vietnam. Il y a une plus grande employabilité chez les diplômés qui ont eu des possibilités au-delà milieu postsecondaire à l’école — l’accès à des programmes de création de réseaux qui favorisent la pollinisation croisée entre les milieu postsecondaire et le secteur privé.

Il y a un autre côté à cette équation plus large. Les parents et les éducateurs doivent encourager les élèves à vivre et à apprendre à l’extérieur du Canada en tant que partie intégrante de leur éducation. Dans les salles de classe des universités et des collèges partout au Canada, nous avons nos meilleurs et nos plus brillants. Nous devons en faire plus pour éliminer les obstacles, les encourager à élargir leurs horizons, à intégrer la mobilité étudiante et à célébrer le dynamisme interdisciplinaire.

Avec un peu d’imagination et le soutien de nos institutions et de nos gouvernements, nous pouvons encourager les jeunes à errer au-delà de leur département, de leur université, de leur province ou de leur pays. Comme Erin Freeland Ballantyne, ils reviendront plus riches pour cela.

Antonia Maioni est présidente de la Fédération des sciences humaines qui tient son congrès annuel à l’Université Brock du 24 au 30 mai ; 8 000 personnes y assistent.

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